Recycling the Problem
Recycling the Problem

Recycler le plastique c'est recycler le problème

Pourquoi nous refusons de promouvoir le recyclage plastique

Pour répondre aux dommages causés par une économie linéaire, l’économie “circulaire” s’est donnée une double mission : diminuer l’utilisation de ressources primaires, en revalorisant les déchets, tout spécialement les matières plastiques.

En ce moment, le futur du plastique se décide à Genève, à l'occasion des négociations pour un Traité international sur les plastiques. Parmi les mesures populaires pour remédier à cette crise, le recyclage arrive en première place comme argument choc de la circularité. Soulager la pression sur les ressources planétaires est de la plus haute importance, mais une mise en pratique qui ne s'attaque qu'à la surface sans reconnaître ses causes et effets profonds pourrait bien aggraver le problème. Avant de se demander comment recycler le plastique, il faut déjà comprendre les enjeux du recyclage.  
Mover Plastic Free Sportswear s’oppose à la promotion du recyclage plastique, car c’est une solution illusoire qui dissimule une production en plein essor. Elle aggrave la pollution et menace la santé planétaire, tout en détournant l’attention des vraies alternatives.

Le recyclage du plastique est un mensonge industriel

Contrairement à ce que l’on pense, la majorité des plastiques ne sont pas recyclés efficacement. Chaque cycle de recyclage dégrade la qualité du plastique, ce qui signifie qu’il finit généralement incinéré, en décharge ou, dans la plupart des cas, dispersé dans l’environnement après un ou deux usages. Le polyester recyclé est issu de déchets de PET, une fois sous cette forme sa qualité est si basse qu’il ne peut plus être recyclé. 

Un alibi pour produire toujours plus de plastique vierge

L’industrie pétrochimique utilise le recyclage comme argument marketing, un écran de fumée qui lui permet de continuer à produire du plastique vierge en masse. Selon l'OCDE, seul 9% du plastique mondial est recyclé.[1] Tant que le recyclage sera présenté comme une solution, la production mondiale de plastique continuera d’augmenter; pour passer de 460 millions de tonnes en 2019 à plus de 1.2 milliards de tonnes d’ici 2060.[2] Le recyclage ne ralentit pas la catastrophe, il l’accélère.

Des microplastiques qui deviennent des produits chimiques éternels

Chaque fois que du plastique est broyé, fragmenté ou recyclé, il libère des microplastiques et nanoplastiques, qui sont encore plus préoccupants :

  • Ces particules micro/nanoscopiques pénètrent les cellules humaines, atteignent le cerveau, les organes vitaux et déstabilisent le système endocrinien. Elles menacent la santé de toutes les formes de vie, perturbant les fonctions corporelles et entraînant des maladies graves à long terme.

  • À chaque fragmentation, elles libèrent des produits chimiques toxiques (PFAs, phtalates, bisphénols…) des « polluants éternels », indestructibles et bioaccumulables. Ces substances peuvent se combiner de manière aléatoire et résulter en des effets encore inconnus des scientifiques.

  • A cause de leur taille, il est impossible de les récupérer : une fois dans l’air, l’eau ou le sol, elles pollueront pendant des centaines d’années.

Un plastique recyclé plus toxique qu’un plastique vierge

Pour que le plastique recyclé soit d’une qualité suffisante, il nécessite plusieurs additifs chimiques : colorants, stabilisants, retardateurs de flamme, souvent dans des quantités plus importantes que pour le plastique vierge. Résultat : un plastique recyclé est tout aussi, voire plus toxique, qu’un plastique vierge.

Au lieu de réduire l’impact du plastique, le recyclage l’aggrave en multipliant la présence de substances dangereuses qui se retrouveront inévitablement dans notre environnement et nos organismes. Recycler du plastique, c’est redistribuer le poison, sous une forme encore plus volatile, et avec des conséquences encore plus graves.

L’industrie du plastique : une atteinte à la vie

L’industrie du plastique n’a pas seulement créé une illusion, elle a commis un crime en manipulant le consommateur. En dissimulant délibérément les conséquences de la production de plastique, elle a contribué à une pollution massive et créé un risque sanitaire mondial.

Exemples frappants : ExxonMobil, récemment poursuivie en justice par la Californie pour avoir dissimulé les dangers du plastique et des produits chimiques associés. Plutôt que de prévenir le public, elle a continué à produire des milliards de tonnes de plastique, malgré les preuves de ses effets dévastateurs sur la santé et l’environnement. Ou W.L Gore & Associates récemment poursuivis en recours collectif aux Etats-Unis pour leur utilisation des PFAS (Substances per- et polyfluoroalkylées) dans ses produits Gore-Tex® destinés aux vêtements techniques, chaussures, gants... malgré les preuves de toxicité.

L’industrie du plastique a menti, dissimulé et exposé des générations à un empoisonnement progressif au nom de sa croissance.

Les bio-plastiques visent à côté

Face à la crise du plastique, le récit d'une solution miracle prend de l'ampleur, celui des bio-plastiques et bio-PLAs. Mais ils ne s’attaquent pas au problème de base. Un bio-plastique reste un plastique. 

  • Même s’il privilégie les matières organiques au pétrole, il dépend lui aussi des composés chimiques pour devenir plastique.

  • Il libère lui aussi des microplastiques et des toxines.

  • Il est tout aussi “impossible” à recycler que le plastique conventionnel.

  • Il n’est pas biodégradable dans la nature, et nécessite des conditions industrielles comme l’anaérobie, c’est-à-dire l’absence totale d’oxygène, qui le rendent impossible à composter à la maison et dans l’océan.

Le danger s'accroît dans les vêtements de sport recyclés

Quand on essaie de prendre les bonnes décisions, on peut vite tomber dans les pièges du marketing "vert". Les équipements faits de bouteilles recyclées ramassées dans la nature ou de synthétiques à base de fibres ou de matières naturelles font la promesse de la durabilité. La réalité chimique de ces matières raconte une autre histoire.
Car ces composés qui permettent aux vêtements de performer, sont ceux-là mêmes qui nous menacent. Et chaque nouveau recyclage, quand il est possible, ajoute davantage de substances mal comprises.
En fait, les risques augmentent par le simple fait de transpirer dans du synthétique. La sueur interagit avec les microplastiques qui s'échappent en permanence des vêtements. Elle facilite l'extraction des composés chimiques et leur absorption directe via la peau [3].
L'équipement de sport en plastique recyclé se base sur une profonde contradiction, il promeut une vie saine en mouvement, et la sabote en même temps.

Tout plastique tue : avant de le recycler, il faut chercher ailleurs

Nous ne disons pas qu’il ne faut rien faire du plastique déjà présent dans la nature. Au contraire, il est urgent de mettre en place des solutions pour qu’il ne revienne pas polluer sous une autre forme. Mais le recyclage du plastique n’est pas la solution. Au lieu de traiter le problème à la racine, il prolonge la présence d’un agent toxique dans notre environnement, aggravant ainsi les risques pour la santé. La seule véritable alternative est de réimaginer les matériaux pour qu’ils soient  régénératifs, biodégradables et non toxiques. Recycler le plastique, c’est prolonger sa toxicité. Le vrai défi, celui qui permettra de limiter l'impact la santé planétaire, est de réduire la production. En tant qu'individus, nous pouvons nous exprimer à travers nos choix en diminuant notre consommation de plastique, à condition d'avoir de réelles alternatives à disposition, et accès à des informations vérifiées. Et bien que le plastique ne puisse pas être substitué partout, des solutions existent déjà pour recréer notre quotidien sur des bases saines. A commencer par ce que nous portons.


[1] OCDE (2023), Perspectives mondiales des plastiques : Scénarios d’action à l’horizon 2060, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/c5abcbb1-fr.
[2]Ibid.
[3] Ovokeroye A. Abafe, Stuart Harrad, and Mohamed Abou-Elwafa Abdallah
Environmental Science & Technology 2023 57 (29), 10554-10562,
https://doi.org/10.1787/aa1edf33-en.

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